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Nicolas Sénégas, parfait artiste imparfait…

Nicolas Sénégas - ©Erika Grace Nicolas Sénégas – ©Erika Grace

Nicolas Sénégas a tout d’abord étudié l’anthropologie avant de se consacrer à la photographie il y a une dizaine d’années.
Ce parcours atypique pose les bases de sa démarche artistique singulière : mises en scène surréalistes et retouche photo qu’il élève au rang d’art, son travail tourne principalement autour du corps humain en évolution. Une démarche spirituelle, recherchant l’être dans sa plus (im)parfaite humanité.
Regardant tout prêt ou cherchant la rencontre de peuples du vaste monde, Nicolas Sénégas nous ouvre l’esprit et fouille un peu plus loin dans les méandres de notre conscience.

Bonjour Nicolas, c’est assez peu commun de passer de l’anthropologie à la photo. Comment en es-tu arrivé là ?
C’est un coup de chance… Ou pas d’ailleurs ! A 17 ans, je pratiquais déjà la photo et avais d’abord pensé à faire des études dans l’image, mais mon choix s’est finalement porté sur la biologie. J’ai ensuite évolué jusqu’à un doctorat d’anthropologie car je trouvais le sujet passionnant, tout en continuant la photo pour mon plaisir.
On m’a fait comprendre au bout d’un moment qu’il fallait choisir entre les deux. J’ai penché pour la photo, tout en conservant ma curiosité pour l’anthropologie.
C’est d’ailleurs cela qui m’amène à voyager pour des commandes scientifiques, par exemple en Mongolie ou en Yakoutie (province du nord est de la Sibérie, ndrl) pour photographier des fouilles, des autopsies… Le fait de comprendre le sujet photographié facilite beaucoup ce travail très technique.
Et concernant la photo et la retouche, je suis quasiment autodidacte, à part des bases en photographie argentique.

Justement, au sujet de la retouche. Combien de temps passes-tu sur une photo ?
Je fais bien sûr un gros boulot de recherche de textures, de matières que j’ajoute au final, mais au départ il y a un vrai travail photographique sur le sujet, la pose, le maquillage, la lumière… pour que la plus grande partie de l’image soit réalisée en réel.
Pour les personnages en cuir par exemple, je les ai entièrement peints en noir, j’ai ensuite simplement ajouté la texture cuir à la retouche. En fait, la difficulté est de trouver le petit effet qui donnera un plus à l’image sans la plomber.
Au niveau du temps passé, c’est très variable, d’une heure à trois ou quatre jours parfois !
Et il y aussi le travail de réflexion préalable qui dans certains cas peut être plus long encore.

Ton travail personnel peut sembler étrange à certaines personnes, voir dérangeant. Par exemple, tes personnages sont régulièrement représentés sans yeux. Quel est le message derrière ces images atypiques ?
Je cherche à faire ressortir le côté humain, un peu « Frankenstein », à questionner le lien entre l’apparence intérieure et extérieure. La photo donne l’avantage de pouvoir rechercher dans un sujet un tempérament ou une esthétique, ou parfois les deux d’ailleurs. J’essaie toujours de trouver une particularité à mettre en avant.
Concernant les yeux, j’aime ce parti pris de juger sans voir. C’est intéressant de casser les codes. Par exemple, lorsque je fais des photos de mode, j’aime en plus des mannequins « conventionnels »,  » beaux  » selon les canons actuels, faire travailler des modèles plus atypiques, différents… des personnes qui ont « du chien » ! C’est ce que j’ai fait dans mon avant-dernière série réalisée pour le magazine OOB, avec une thématique qui se prêtait a ce jeux. Dans le numéro de ce mois-ci, la série est plus axée sur le corps impressionniste.

Tu travailles beaucoup en noir et blanc ou monochrome. Pourquoi ?
Parce que j’adore ça, il y a beaucoup à dire en noir et blanc. Ça permet aussi de mettre une distance par rapport au réel, de nous plonger dans un autre univers.

Peux-tu me parler de tes commandes professionnelles ? Je pense notamment à l’enseigne de décoration «Les Héritiers» ?
Je travaille souvent avec les 2 décorateurs « Les Héritiers » soit pour des hôtels de Luxe, soit en travaillant sur des commandes qui sont plus des collaborations comme dans le cas du salon Maison & Objet de Paris, où il s’agissait de monter une série de photographies sur les statues de Paris et de créer une galerie avec des tirages d’art.
En général, on me propose une thématique et je cherche à y apporter mon point de vue personnel. En ce moment je termine une série sur les réverbères et les lueurs des rues de Paris pour un hôtel situé dans le quartier latin à Paris.

De nouveaux projets en perspective ?
J’ai plein de projets personnels laissés en suspend. Mes commandes sont bientôt terminées, je vais donc pouvoir m’y consacrer.
Je travaille pour «Eths», un groupe de métal marseillais.
Il y a aussi, «Corpus Christix» (à voir sur le site officiel, ndrl). Pour le moment je n’ai photographié qu’un seul modèle, mais j’aimerais continuer à travailler ce côté iconique et androgyne, ce mélange des genres qui le rend quasiment neutre.
Dernièrement, j’ai également chiné beaucoup d’objets en vieux cuir que j’aimerais marier à un travail sur le corps. Je suis aussi à la recherche de matières et de nouveaux modèles à photographier.
Enfin, je commence tout juste la retouche des photos personnelles, prises en Mongolie cet été. Je profite en effet de ces voyages anthropologiques pour aller à la rencontre des nomades, m’immerger et faire leur portrait.

Depuis combien de temps travailles-tu avec Picto Toulouse ? Que t’apporte cette collaboration ?
Depuis une dizaine d’années déjà. On se connaît bien, ils comprennent et tolèrent mes exigences artistiques, ils savent ce que je recherche, m’aident à trouver des matériaux originaux et des solutions techniques, font des tests… Ils me préviennent aussi en amont quand un tirage n’a pas le rendu souhaité et m’orientent pour le retravailler différemment.
C’est un vrai travail d’équipe !

Merci Nicolas ! A bientôt dans de nouveaux univers…

Pour en savoir plus sur Nicolas Sénégas, vous pouvez visiter son site : www.nicolassenegas.com
Ou suivre son actualité sur sa page facebook : www.facebook.com/nicolas.senegas

Nicolas Sénégas - Black Mickey © Nicolas Sénégas

Pascal Bachelet, humain par nature

Pascal Bachelet Pascal Bachelet

Il y a une quinzaine d’année, Pascal Bachelet quittait un confortable fauteuil de cadre dirigeant pour réaliser son rêve : devenir photographe…
Une attitude qui dénote un grand courage sûrement, un petit brin de folie aussi. Une porte tournée sans regret, pour s’ouvrir entièrement à une passion pour la photo certes, mais pour la nature et la nature humaine plus probablement. Derrière son objectif, Pascal Bachelet parcoure la France et le monde, en quête de chemins à découvrir et de rencontres à partager.
En route !

Pascal, parlez-nous un peu votre rapport à la nature et à l’humain, qui sont vos sujets de prédilection.
Je fais avant tout un travail documentaire qui porte non seulement sur les paysages, mais aussi sur les habitants, les gens qui font vivre ces lieux. J’ai aussi un travail de photographe reporter, notamment pour la Croix-Rouge avec qui je collabore assez régulièrement et qui m’envoie en reportage, essentiellement en France.
Le but est d’apporter un témoignage de ce que sont et ce que font les personnels œuvrant dans leurs établissements, et des actions mises en œuvre sur des sujets aussi divers que l’autisme, les malades Alzheimer, les jeunes en difficulté, le handicap, les maraudes…
J’ai souhaité devenir photographe pour faire ce type de reportages. Les documentaires portant sur les paysages et en découlent tout naturellement. Lorsque je pars pour un projet, je veux revenir avec des images qui soient le plus juste possible, un reflet de la réalité. Du coup, avant de photographier, je fais un long travail de préparation et d’immersion. Je prends le temps d’expliquer ma démarche et de m’intéresser vraiment aux gens que je rencontre. Grâce à cela, ils me font confiance et mes photos sont au final le fruit d’une vraie réciprocité.

C’est pour cela que j’ai tout quitté : pour le bonheur d’aller vers les autres derrière le prétexte de mon appareil photo, avec cette envie de marcher pour découvrir et vivre un lieu, de m’immerger. Quand on photographie, on va au delà du simple aspect des choses, cela pousse la curiosité naturelle.

Vos projets d’expos s’accompagnent presque systématiquement d’un livre. Pouvez-vous nous expliquer votre démarche ?
Effectivement, je trouve la mise en perspective qu’offre l’édition très intéressante.
Je monte toujours mes projets d’expos avec dès le départ une volonté d’itinérance et un travail avec un ou des auteurs pour donner du sens, développer un autre point de vue. C’est une manière différente de montrer un travail.
Le rapport du lecteur/spectateur n’est pas le même lorsqu’il se trouve face à une exposition ou qu’il feuillette les pages d’un livre. Il n’est pas dans la même situation et n’aura donc pas le même regard sur le sujet.
J’ai toujours l’envie, lorsque je travaille sur un livre d’associer photographies et écrits. On ne peut pas tout dire avec des photos, le texte permet de mettre en lumières d’autres facettes, d’aller plus loin.

Comment choisissez-vous les écrivains et journalistes qui collaborent avec vous ?
Est-ce la rencontre qui détermine le sujet ou bien l’inverse ?

Un peu des deux en fait. Sur certains projets, j’avais déjà en tête en les imaginant, une idée du collaborateur à qui j’avais envie de le proposer. Pour d’autres, comme par exemple « Papa, maman, la rue et moi », c’est la rencontre avec la journaliste Véronique Mougin qui nous a amené à trouver un thème de collaboration.
Elle est spécialiste de ce sujet qui m’intéressait particulièrement, nous avons donc cherché ensemble un axe de travail et choisi de mener notre enquête sur le mal logement et la vie de famille. Nous avons partagé le quotidien de ces personnes durant deux ans, pour apporter un témoignage sinon fidèle, tout au moins réaliste de leur situation(s).
C’est parfois aussi le hasard qui m’amène à collaborer avec des écrivains, journalistes. Je termine tout juste un projet sur le Mont-Blanc (développé dans le cadre d’une résidence artistique à la Maison forte de Hautetour, pour le compte de la mairie de Saint-Gervais), qui consistait à en faire le tour durant 5 semaines.
Le hasard a voulu que durant ce cheminement, je croise Manon Rescan, journaliste au Monde et randonneuse. Nous avons discuté, échangé nos coordonnées et collaborons aujourd’hui sur le livre : « Tour du Mont-Blanc », à paraître en juillet 2015. J’ai également demandé à l’historien Gabriel Grandjacques (originaire de Saint-Gervais) son éclairage sur ce territoire et ses habitants. Tout cela en fait un ouvrage riche !

Avez-vous déjà d’autres projets en vue ?
Les projets ne manquent jamais, ce sont plutôt les financements qui me freinent malheureusement. D’ailleurs, j’ai ouvert l’édition du livre « Tour du Mont-Blanc » au financement participatif sur le site KissKissBankBank.com, ce fut un franc succès car nous avons dépassé les objectifs (La souscription sur le site est terminée, mais vous pouvez toujours apporter votre contribution à l’édition grâce au formulaire à télécharger ici).
En plus du livre, mon travail sur le Tour Mont-Blanc a fait l’objet de 2 expositions. Une première sur les paysages (en novembre 2014), et une seconde, présentée jusqu’au 28 juin 2015 à la Maison Forte de Hautetour à Saint Gervais, qui montre des scènes de vie : « Visages du Mont-Blanc ». Cette exposition fera ensuite l’objet d’un itinérance dans différents lieux.
Sinon, pour les projets à moyen terme, j’aimerais refaire le même type de travail qu’au Mont-Blanc sur les Monts des Flandres (dans le Nord-Pas-de-Calais,Picardie ma région d’origine) et l’équivalent de « Carnet de Cols » (réalisé dans les Alpes sur l’itinéraire qui sépare le Lac Léman de la Mer Méditerranée) dans les Pyrénées.
J’aime beaucoup me donner des objectifs en termes d’itinérance. Par exemple dans mon travail sur le fleuve Somme, j’ai descendu le cours d’eau sur les quatre saisons, en partant de sa source jusqu’à la baie de Somme. De même avec la boucle du tour du Mont-Blanc, avec toujours ce principe d’immersion totale dans le paysage comme dans la vie de ses habitants.

Vous travaillez avec Picto depuis vos débuts, que vous apporte cette collaboration ?
Effectivement, cela fait déjà une dizaine d’années. Picto est mon premier labo et le seul finalement, car même habitant dans le Nord, je fais les déplacements à Toulouse pour travailler avec Patrick ou Lionel. Nous collaborons même parfois à distance, je sais que je peux leur confier mes tirages les yeux fermés ! Nous avons une réelle relation de confiance, un partenariat. Ils ont été très impliqués sur tous les projets que j’ai pu mener en photogravure comme pour les expos.
Chez Picto, je me sens un peu comme chez moi, nous prenons tout le temps qu’il faut ensemble pour optimiser l’image. Ils connaissent mon travail, ce que je recherche et m’aident beaucoup sur la chromie, le calage… Je me repose complètement sur eux pour tous ces aspects là. C’est très appréciable car vraiment rare.
J’ai aussi beaucoup apprécié qu’ils me présentent l’imprimerie toulousaine Reprint, qui se charge aujourd’hui de l’édition de mes livres (nous en sommes au 3ème ouvrage). Ils travaillent main dans la main et je suis parfaitement satisfait de sortir grâce à leurs équipes, un travail aussi abouti.
Ce sont des vrais professionnels et travailler avec eux m’assure donc une vraie tranquillité d’esprit !

Pascal, merci pour ce beau voyage ! En espérant vous retrouvez bientôt pour de nouveaux projets, à la croisée d’un chemin…

En savoir plus sur Pascal Bachelet : www.pascalbachelet.com

Pascal Bachelet - Tour du Mont-Blanc © Pascal Bachelet – Tour du Mont-Blanc
Pascal Bachelet - Carnet de Cols © Pascal Bachelet – Carnet de Cols
Pascal Bachelet - Croix-Rouge Française © Pascal Bachelet – Croix-Rouge Française
Pascal Bachelet - Visages d'un fleuve - La Somme © Pascal Bachelet – Visages d’un fleuve – La Somme
Pascal Bachelet - Vies d'ici - Portrait d'un village de Picardie © Vies d’ici – Portrait d’un village de Picardie

Stéphane Giner, photographe… mais pas que !

Crédit photo : © Stephane Giner Crédit photo : © Stéphane Giner

Vous ne connaissez peut-être pas son nom, mais fidèles lecteurs que vous êtes, vous avez déjà eu un aperçu de son travail : Stéphane réalise les portraits de la rubrique « Compétences » de cette newsletter ! Passionné depuis son plus jeune âge de photographie et d’informatique, Stéphane Giner peut dire merci à Steven Sasson d’avoir inventé le numérique (pour Kodak en 1975, ndrl) ! Photographe, graphiste, webdesigner… Stéphane est un touche à tout, mais maîtriser la technique ne suffit pas. Etre un bon photographe nécessite une bonne dose de talent, beaucoup de travail et un peu de chance aussi…

Stéphane, comment t’es venue l’envie d’être photographe ? Il y a eu 2 personnes très importantes pour mon avenir professionnel : mon père, informaticien, m’a mis un ordinateur entre les mains alors que je savais à peine écrire ! C’était un ZX81, un des premier PC conçu. Il m’a appris la programmation et donné l’envie de créer des choses avec un ordinateur. Ensuite, le second mari de ma mère. Un photographe passionné qui m’a donné la culture de l’image et l’envie de capturer le monde. En âge de travailler, j’ai naturellement cherché à allier ma passion pour l’image et la photo, aux possibilités de création qu’offrait l’outil informatique.

Comment as-tu démarré ? J’ai fait une école de photographie en alternance au studio de mon beau-père et dès l’obtention de mon diplôme, j’ai monté ma petite entreprise de retouche photo. C’était quelque chose de très novateur pour l‘époque et j’étais certainement un peu en avance sur mon temps car en 92, la photographie numérique n’en était qu’à ses balbutiements. La plupart de mes contrats portaient plus sur le scan de négatifs et la retouche de vieilles photos de famille… Pour me diversifier, j’ai donc commencé à faire de la création graphique, par relations. Mes amis me demandaient de réaliser les flyers de leurs soirées, le commerçant du coin avait besoin d’un logo… Je scannais mes matières et travaillais à partir de mes propres photos, ça a duré un peu plus de 5 ans. Puis j’ai eu envie de changer d’air. La Bretagne m’attirait pour ses beaux paysages et la sympathie de ses habitants, je suis donc parti à l’aventure ! J’ai rapidement été embauché par une imprimerie de Dinan qui souhaitait intégrer un studio graphique et me suis remis un peu plus à la photo. Je bossais pour un journal gratuit de Saint-Malo pour qui je réalisais des portraits et reportages. Mais bon, je suis du sud, la pluie ça va un moment ! Je suis donc retourné à Toulouse au bout de 2 ans, où j’ai été embauché comme DA web par une start up. Le job était bien payé mais je tournais en rond. A l’époque, on était pas mal contraints par la technique et dans ce milieu, les clients sont souvent frileux dès qu’il s’agit d’être un peu créatif… Je suis donc parti rapidement pour rejoindre l’équipe d’un ami, fondateur de la marque BullRott. Ça commençait à marcher pour eux et ils cherchaient quelqu’un pour gérer leurs prises de vues packshot, la pub et le graphisme de l’entreprise. J’ai redécouvert le plaisir de travailler en studio. Ça m’a permis de tester plein de choses, d’améliorer ma technique. Au bout de quelques années, les associés ont décidé de vendre leur licence et se séparer. Je me suis donc retrouvé au chômage.

Et donc, tu as remonté une entreprise ? Et oui, je dois avoir la fibre entrepreneuriale ! En fait, j’avais très envie de démarrer un nouveau projet, mais quoi ? J’étais toujours tiraillé entre photo et informatique… J’ai donc décidé d’attendre un peu. J’avais du temps libre et des indemnités de licenciement, je me suis donc remis à fond dans la photo pour mon seul plaisir. J’ai acheté du bon matériel et me suis mis à shooter tout ce qui m’inspirait, ensuite je postais les clichés sur flickr. Plusieurs entreprises ont vu mon travail et m’ont fait des demandes, j’ai donc fini par me remettre à mon compte. Et voilà. Ça fait plus de 8 ans !

Où en es-tu aujourd’hui ? Je viens de créer un nouveau studio (le Studio O.H. au 130 avenue des Etats-Unis), en binôme avec Pierre Beteille qui est à la fois graphiste et photographe.

Nous ne sommes pas associés, mais collaborateurs. L’idée est d’échanger, de mettre nos compétences en commun. Nous avons complètement réaménagé ce lieu de 75m2 pour travailler sur des projets studio. On souhaite surtout développer notre activité et s’ouvrir à une nouvelle catégorie de clients.

As-tu des projets perso ? Pleins ! Quand on travaille beaucoup, on manque de temps pour se consacrer à la création personnelle. C’est vraiment dommage car c’est elle qui nourrit la passion pour son métier, l’imaginaire et du coup la création professionnelle ! Et n’oublions pas que c’est grâce à mon travail personnel que je suis devenu photographe pro. J’ai de nombreux projets en ce moment et suis très motivé par ce nouveau studio, j’ai envie qu’il devienne un espace de création à part entière.

Pour toi Picto Toulouse est à la fois un client et un partenaire puisque tu fais tes tirages chez eux, peux-tu m’en dire un peu plus sur cette collaboration ? Effectivement, je connais l’équipe Picto depuis pas mal d’années, j’y faisais déjà développer mes pellicules ! J’ai réalisé avec eux la plupart de mes tirages d’expo, je leur confie mes tirages photo de commande et nous collaborons aussi sur le festival MAP depuis 3 ans. J’aime le fait de pouvoir travailler ensemble jusqu’à obtenir la meilleure chromie, le meilleur contraste, ils sont vraiment à l’écoute et font un travail de qualité. Le couple photographe/tireur existe encore, même depuis le passage au tout numérique ! J’ai aussi beaucoup apprécié le fait qu’ils me confient les portraits de la rubrique « Compétences » de la newsletter et la carte de vœux 2015. Ils ont confiance en moi et en moi en leur travail. C’est une relation de confiance réciproque en fait !

En savoir plus sur Stéphane Giner : stephaneginer.com
En savoir plus sur le Studio O.H. : studio-oh.fr


Jean Belondrade, des photos et des Hommes

Jean Belondrade Jean Belondrade

Débuter avec Dieuzaide, ce n’est pas rien ! Mais depuis ses débuts, le “petit montagnard” né dans l’Ariège, en a fait du chemin. Il a surtout gravi le plus haut et le plus difficile des sommets : sa pudeur.
Photographe professionnel reconnu, Il aura pourtant attendu l’âge de 50 ans pour montrer ses travaux personnels, et 40 pour traiter enfin le sujet qui le tenait le plus à cœur : l’être humain, les gens, les personnes. A opposer à la notion d’ “Humain”, chère aux pros du marketing et de la communication, qui englobe les individus sans les regarder vraiment.
Toujours avec la même humilité, Jean Belondrade voyage aujourd’hui dans le monde entier et s’adresse directement à chacun d’entre nous, questionnant notre quotidien, notre individualité, nos rêves et nos espoirs. Nous rappelant que d’où que l’on vienne et quel que ce soit notre âge, nous avons tous en commun cette humanité faite d’amour, d’idéaux, de passion mais aussi de petits moments tous simples…

Jean, à quel moment avez-vous compris que la photographie deviendrait la passion de toute une vie et votre métier ?
La photo a pris très tôt une place dans ma vie. Enfant, j’ai trouvé du matériel de laboratoire dans le grenier de ma maison de famille, j’ai été intrigué. C’était du matériel ancien, de l’époque où, avant les agrandisseurs, on faisait du contact à partir de plaques de verre.
Puis en classe de 3ème, on m’a proposé de m’occuper du laboratoire photo du Caousou et j’ai vraiment commencé comme cela, à la chambre noire.
Je prenais mon vélo et partais faire des prises de vue dans la campagne ariégeoise et la montagne. J’adorais la liberté que me procuraient ces promenades où j’étais seul avec ma musette et mon appareil photo. Par timidité, je n’osais pas m’approcher des gens, mes sujets s’arrêtaient donc aux paysages, aux moutons… Il m’a fallu d’ailleurs attendre plus de 30 ans avant d’oser enfin !
Je crois que j’ai toujours voulu être photographe, ou journaliste, contre l’avis de ma famille qui souhaitait me voir devenir médecin. A la mort prématurée de mon père je me suis enfin inscrit à des cours de photo par correspondance dans une école américaine. J’ai été au bout de mes cours tout en faisant mon armée puis j’ai présenté un dossier à Jean Dieuzaide qui m’a embauché ; le dossier n’était pas très bon, il a été généreux. J’ai eu beaucoup de chance !
Je crois tout simplement que le courant est immédiatement passé entre nous. Il a été pour moi à la fois une image du père et du maître…

Vous souvenez-vous de votre première photo ou en tout cas, de celle qui a marqué vos débuts ?
J’ai toujours une grande fierté pour ma première photographie professionnelle réalisée pour l’atelier Yan. Nous étions 3 ou 4 photographes du studio, dépêchés pour photographier l’instant précis où le Concorde 002 quitterait le sol. On nous avait répartis à différents endroits de la piste, ne sachant pas exactement le trajet que l’avion emprunterait et par chance, c’est devant moi qu’il a décollé.
C’était une photo au grand angle, légèrement sous-exposée, mais quel bonheur d’avoir pu saisir cet instant !

Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de montrer vos travaux personnels ?
Parce que c’est quelque chose de très difficile psychologiquement. Par pudeur ou par réserve, je suis passé à côté de beaucoup d’opportunités. Je considérais que ce n’était pas assez bon pour me confronter au regard de mes collègues photographes.
Pourtant montrer, c’est progresser ! Mais je crois que j’ai toujours eu le complexe du “petit montagnard”, j’ai mis longtemps à me sentir à ma place en ville comme dans le monde de la photographie (en dehors de mes travaux professionnels pour lesquels j’étais déjà reconnu) parce que je n’ai jamais eu ce sens du réseau, cette fibre qui fait que l’on sait se vendre. La solitude est une qualité très répandue chez les photographes mais elle a ses limites.
J’ai eu le déclic d’un coup, quand j’ai découvert le Minox 35. C’était un tout petit appareil, à l’opposé des chambres 4×5 inch et des Hasselblad avec lesquels je travaillais habituellement. Grâce à cet outil discret, j’ai enfin osé m’approcher des gens et mon travail a pris une nouvelle tournure.

J’ai sorti mon premier livre “Vu, familles photographiques” en 1999. Il confrontait des images qui n’avaient rien à voir mais qui fonctionnaient bien par couple et par association d’idées. Ce n’était pas un travail très abouti, car à l’époque je n’avais pas assez de matière. Mais l’idée était bonne et est devenue de plus en plus intéressante car j’ai continué à l’enrichir au fil du temps, à coller de nouvelles images au grè de mes reportages. En tout cas, cela m’avait mis le pied à l’étrier.

Pour les “Greniers de France”, j’ai commencé cette série sur mon temps libre, jusqu’à réaliser un livre mêlant mes photos à des textes écrits par des ethnologues, édité chez Privat. J’ai contacté Philippe Terrancle (Directeur des éditions Privat) et il a tout de suite été emballé par le projet car tout le monde aime les greniers. Il y a quelque chose lié à l’enfance, une nostalgie.
C’était un travail très intéressant d’abord parce qu’il était très difficile de trouver des gens qui acceptaient de me laisser entrer dans ce lieu intime où se cachent les secrets de famille. Et ensuite parce que je m’étais fixé l’objectif de ne toucher à rien, de laisser le lieu tel que je l’avais trouvé, sans déplacer les objets, sans ajout de lumière. Je photographiais donc en pauses longues au retardateur et découvrais les photos après coup, c’était passionnant. J’ai un peu retrouvé l’émerveillement de l’époque argentique, où il fallait attendre le tirage pour révéler l’image.

Pouvez-vous nous parler de Goanda ?
J’ai créée cette entreprise en 2008 avec mon fils et deux collègues photographes car nous avions envie d’aborder ensemble un travail d’auteur, mêlant photographie et écriture.
Nous réalisons des livres professionnels pour des entreprises (en particulier dans l’industrie), en proposant une approche très différente d’une pure démarche publicitaire.
Mon premier livre de ce type, réalisé pour le Groupe Cahors “Nos hommes ou la Traversée du siècle” retraçait la vie des employés de cette entreprise à travers le monde (du Lot à la Chine, en passant par l’Inde, l’Espagne, l’Uruguay, etc.), montrait des scènes de vie. Il était plus proche d’un reportage pour “Géo” que d’une plaquette commerciale et c’est cela qui a fait le succès de ce projet.
Le plus difficile est de faire comprendre au client que pour que cela fonctionne, il faut s’extraire complètement de toute action de communication. Ici, c’est le travail d’auteur qui donne de la valeur à l’entreprise. Les communicants parlent toujours de “l’Humain”, mais ils oublient les individus.
J’ai convaincu le PDG du groupe d’éditer un exemplaire pour chacun de ses employés et pas seulement pour les grands comptes, les investisseurs, etc. L’idée était de valoriser les gens qui font l’entreprise et non de simplement faire de la pub auprès des clients et actionnaires.
C’est tout cela la démarche de Goanda, porter une idée forte et la mener à son terme.

Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?
Depuis quelques temps, j’entame une nouvelle période, avec une approche différente. Je m’efforce de photographier des vraies scènes de vie plutôt que céder à la facilité des portraits.
Mais nous faisons un vrai métier, de plus en plus difficile. Il faut beaucoup de qualités pour être photographe aujourd’hui, au delà de la facilité technique évidente, alors que tout a déjà été fait et à la perfection, dans le domaine de la photographie humaniste.
Un exemple, pendant des années j’ai travaillé sur l’Ukraine, j’ai beaucoup d’images des jours heureux. J’ai proposé cette série à des magazines, j’ai voulu en faire un livre… Ce travail n’intéressait personne! Il y a un an j’ai passé Noël à Maidan sur les barricades et Il a fallu ces évènements pour que le monde commence à s’intéresser à ce pays. Mais les médias veulent des chars et des images de guerre, pas des photos de l’Ukraine en paix. C’est pourtant ça, l’Ukraine, cette simplicité confiante qui s’est abîmée et peut-être perdue.

Il faut toujours avoir des projets dans ses tiroirs. J’ai commencé récemment une collection de photographies sur le thème de “l’Homme qui marche”, pour aborder l’aventure unique, de l’enfant qui dès qu’il se lève pour ses premiers pas maladroits ne cessera de marcher qu’à la mort. “Lève toi et marche !” : la chose la plus extraordinaire et en même temps la plus naturelle qui soit, alors qu’aujourd’hui une bonne partie de l’humanité (et la majorité des photographes) passe la plupart de son temps assise devant un ordinateur.

Depuis deux ans, je m’amuse également avec une série appelée “Libertad”. De la façon la plus simple, j’essaie de susciter l’idée même de liberté alors qu’elle prend aujourd’hui un sens différent, qu’elle n’est plus aussi évidente, révolutionnaire. Notre liberté nous est grignotée, rabotée implacablement, systématiquement, jour après jour, dans tous les domaines de l‘activité humaine. Vivre libre était un combat, c’est devenu un défi.

Vous travaillez avec Picto depuis de nombreuses années. Que vous apporte cette collaboration ?
Effectivement, je connais Picto depuis leurs débuts (NDRL : pour rappel, l’entreprise est installée à Toulouse depuis 1989) et outre la grande qualité de leur travail, l’un de leur point fort est d’avoir conservé les mêmes interlocuteurs amicaux et bienveillants, depuis toujours.
Du coup, une vraie relation de confiance s’est installée, un rapport particulier. Moi qui doute souvent, j’écoute attentivement leurs conseils, je me fie à leur choix quand j’hésite.
C’est un vrai travail d’équipe !

En savoir plus sur Jean Belondrade :
www.jeanbelondrade.fr
www.goanda.eu
Jean Belondrade - Libertad © Jean Belondrade – Libertad
Jean Belondrade - L'homme qui marche © Jean Belondrade – L’homme qui marche
Jean Belondrade - Ukraine, les jours heureux © Jean Belondrade – Ukraine, les jours heureux
Jean Belondrade - Greniers de France © Jean Belondrade – Greniers de France

Anthony-Noel Kelly, une nature inspirante

Anthony-Noel Kelly Anthony-Noel Kelly

Anthony-Noel Kelly utilise différentes techniques pour explorer un terrain vaste comme l’univers : la nature. Humaine, animale, végétale, minérale, il interroge les cycles de la vie, de la naissance à la mort et oppose la forme brute, à l’idéal de beauté que le monde impose.
Héraclite nous disait que « Rien n’est permanent, sauf le changement ».
Kelly décompose, nous montre des angles différents de cette nature en perpétuelle mutation. Par la peinture, la sculpture et la photographie, il questionne le besoin de contrôle de l’humain sur une nature pourtant bien plus forte que lui, et le met face à la réalité de son impuissance à maîtriser le temps qui passe, lui rappelant un peu plus chaque jour sa nature profonde : vivante et mortelle.

Cette interview restera gravée dans ma mémoire comme un moment hors du temps. Jorge et moi sommes arrivés étourdis par le magnifique paysage et l’impression de plénitude qui se dégage de la bastide perchée sur les collines au dessus de Beaumont-de-Lomagne dans le Tarn et Garonne. Entrer dans l’univers de Kelly est quelque chose d’incongru : la maison semble à la fois pleine de vie, jonchée de jouets d’enfants et d’objets en tous genre ; et en même temps calme, endormie et irréelle tel le château du Grand Meaulnes… L’atelier est garni de petits objets, insectes, végétaux, cranes ou carcasses d’animaux… Collectés au gré du temps et des promenades. Dans chaque pièce de la maison, les antiquités et souvenirs de famille se mêlent à l’art contemporain. Le sien et celui de beaucoup d’autres aussi, amis, artistes croisés au fil du temps… Plus on visite et plus il y a voir. J’ai découvert un homme passionné d’art et d’histoire, exalté par la création d’un monde qui ne ressemble à aucun autre (mais lui vous dira : ou à n’importe quel autre)…

Anthony, peux-tu nous raconter ton parcours, comment es-tu arrivé en France ?
Après plusieurs années en Angleterre, j’ai habité l’Irlande qui est un pays magnifique, vert mais où l’on voit peu le soleil. C’est pour cela que nous avons choisi de nous installer ici, dans le sud de la France. La nourriture est aussi moins riche en Irlande ! J’adore le magret de canard par exemple. Et pour mon parcours artistique, il a commencé très tôt, j’ai toujours été créatif et à 19 ans, j’ai suivi un stage de 4 ans en restauration/conservation de tableaux en Belgique et en Allemagne. C’était intéressant pour la maîtrise de la technique, mais peu épanouissant d’un point de vue créatif, j’ai donc préféré peindre pour moi et un peu plus tard, je suis entré à la London School of Art pour apprendre la sculpture.

Tu travailles différents médiums, lequel préfères-tu ?
Cela dépend des moments, je travaille la photographie plutôt l’été pour des questions de lumière. Le reste du temps, je me consacre plus à la peinture et la sculpture. Je pense que la peinture est l’art le plus accessible. On part de rien, d’une toile blanche et on crée. Les gens comprennent mieux la peinture que d’autres formes d’art, ils peuvent dire tout de suite s’ils ressentent une émotion. En particulier lorsque l’on fait des portraits, car le spectateur les regarde dans les yeux, ça invite à la conversation. Une conversation intime et réelle. Il n’y a pas cette humanité si directe dans un paysage ou une nature morte.

Anthony, la nature est ta source d’inspiration, comment décides-tu de la manière dont tu souhaites la montrer ?
Je ne cherche pas tellement. La nature se suffit à elle-même, elle est parfois belle et grandiose, parfois inexplicable et cruelle. Je prends simplement de petits morceaux de vie et les montre de manière réaliste. A côté de ma pratique artistique, je dirige une entreprise d’élagage. Et c’est parfois là que je trouve l’inspiration. La sculpture nommé « souche » par exemple est une vraie souche d’arbre que j’ai extraite d’un terrain. Je l’ai trouvé belle et en ai fait un moule dans lequel a été coulé de l’aluminium. (Cette sculpture magnifique et gigantesque -1,70m de large pour 90cm de haut- est exposée dans le couloir de sa maison).
J’aime aussi travailler à partir de nourriture parce que je trouve ça visuellement intéressant. Mais je ne suis pas gourmand, je ne cuisine pas, cela prend trop de temps. J’aime les choses rapides. Je trouve simplement qu’il y a dans la nourriture une harmonie, des couleurs profondes. Au marché, je fais le tour des étals, je regarde les formes, les couleurs puis je les mets en scène. J’adore aussi acheter de jolies tartelettes chez le pâtissier pour simplement les écraser une fois rentré à l’atelier !

Sur quel projet travailles-tu en ce moment ?
Cette année, j’ai fait beaucoup de cartes (Anthony met en scène de la nourriture, des insectes et divers petits objets sur des cartes du monde). Et j’ai aussi commencé quelque chose de passionnant ! Je collectionne des livres sacrés et des objets de culte de toutes les religions, et même sur l’athéisme. J’ai envie de confronter ces objets, de les mettre en scène en vue d’une exposition. Mais c’est loin d’être terminé.

Que t’apporte Picto dans ta démarche artistique ?
Je connais l’équipe Picto depuis 8 ans environ, nous avons une relation fidèle ! C’est comme un partenariat. Je leur fais confiance pour le nettoyage de mes images et la qualité d’impression. Parfois aussi, je veux créer certaines choses mais je ne sais pas comment. Picto m’aide à réaliser mes idées en apportant des solutions techniques pour résoudre ces problèmes.

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Anthony-Noel Kelly © Anthony-Noel Kelly